Après l’accord mutuel des parents des jeunes mariés, ces derniers fixent le jour d’aller annoncer le mariage aux collectivités locales. Le jour de la conclusion de l’acte du mariage appelé « Nikah ». Ce jour les notaires « Adoul » viennent à la maison de la jeune mariée pour écouter son consentement sans qu’ils puissent la voir. Parmi les anecdotes de cet événement c’est la belle-sœur ou l’une des tantes de la mariée qui assure cette confirmation de consentement du mariage quand la timidité empêche cette dernière de le faire.
Après l’accord de la mariée, les deux familles passent à l’étape « Lkimt » qui est une sorte d’évaluation de son trousseau constitué des dotations faites à la mariée par ses parents. «Lkimt» se compose généralement des bijoux en argent vu la cherté de l’or et des vêtements.
La mariée est la seule propriétaire de Lkimt et son mari est tenu responsable de sa conservation. En cas de répudiation, le mari est obligé de la rembourser au père de sa femme répudiée, s’il en fait l’usure, pour la redonner à sa fille si un nouveau mari se présente. Aussi, Lkimt est une sorte pour solder sa part d’héritage puisque ce dernier, par coutumes, doit être protégé contre la division avec d’autres familles et être gardé dans la lignée agnatique.
Les représentants des deux familles font alors une sorte de marchandage quant à la valeur des articles du trousseau. Les prix sont débattus, et parfois, les discussions tournent mal pour peu et mettent en péril l’alliance en cours. Dans certains villages, on invite des bijoutiers pour assister à l’évaluation des articles et empêcher par la suite le gonflement des prix par les agnats de la jeune mariée. Tous les prix des articles sont enregistrés par les notaires « Adouls » au dos de l’acte de mariage ce qui garantit à la femme l’assurance contre la répudiation et la pauvreté mais aussi la récupération de Lkimt en cas de divorce.
La valeur de Lkimt a donc d’énormes effets sur cette garantie. Le droit coutumier donne à la femme le droit de poser des conditions à son mari : de ne plus se remarier, de ne pas quitter le foyer plus de trois mois ou encore de partager en cas de divorce tous les biens que le couple a accumulés pendant le mariage.
Après l’acte du mariage, la jeune mariée se dérobe à la rencontre des membres de sa famille en s’installant ailleurs. Elle se dissipe alors de leurs vues. Elle se met en refuge chez les voisins ou chez un membre de la famille maternelle ou paternelle. D’après notre recherche sur la cause de ce refuge trois versions nous ont été délivrées : la première précise que la jeune mariée est intimidée par l’acte du mariage, la deuxième stipule qu’il faut l’habituer au fait de la séparation avec sa famille pour qu’elle puisse s’intégrer facilement dans sa nouvelle famille, et la dernière exprime une certaine méfiance contre la magie et attitudes négatives des jaloux qui peuvent causer un désagrément à la fête du mariage. Ce n’est qu’au jour où la famille du mari vienne la chercher qu’elle regagne la maison familiale.
Selon les traditions dans certaines régions du Souss Massa, le mariage d’autrefois durait cinq jours.
Il commence le dimanche et finit le jeudi :
Le mari reste absent du cortège qui va apporter les cadeaux à la jeune mariée. Les femmes membres de la famille du mari sont accompagnées par un groupe de jeunes hommes, parmi eux le frère du mari qui porte AKRISSE ou TAKRISSTE s'agissant en fait d'une sorte de dote offerte par le mari à sa future épouse.
Cet « Akrisse » comporte des cadeaux tels que les babouches brodées en soie « Idukan lhrir », un drap traditionnel en laine « Afagou » que la mariée doit porter pour aller chez sa nouvelle famille et d’autres objets cérémoniels.
L’homme qui porte Akrisse ne doit pas le déposer facilement sans qu’il demande des objets que la famille de la mariée doit lui fournir. Auparavant on demandait des sauts de beurre rance, de miel pur ou des poissons secs et généralement des choses qui permettent à la famille du mari de constater que la jeune mariée est issue d’un entourage ou le travail manuel fait des richesses et qu’elle est aussi formée de leur préparation. Après un débat de négociation et de résistance, le jeune homme portant « Akrisse » décide, après consultations et discussions avec les autres membres de sa famille, de le déposer.
D’autres rituels s’ajoutent à la cérémonie d’« Akrisse » : le frère de la mariée lui met les babouches alors que sa mère lui remet l’habit traditionnel qui lui a été offert par son époux dans une atmosphère de chants «Tisuranin ».
Ce jour d’Akrisse, la mariée reste encore un jour chez ses parents. La famille du mari, après avoir reçu toute l’hospitalité due, regagne son domicile pour préparer l’arrivée de la mariée et de sa famille.
La mariée quitte sa maison natale en cortège vers son futur domicile. Escortée par ses amies et les femmes de sa famille, sous un drap pour la protéger, jusqu’à son foyer qui est généralement proche (dans le même douar ou dans un douar à côté). Si le trajet est long elle part à cheval avec son frère.
Une fois arrivée, la jeune mariée trouve la porte de sa nouvelle demeure fermée et le groupe accompagnateur se met à chanter « Tisuranin » qui font l’éloge de la mariée. La famille du jeune mari jette alors d’en haut des amandes et des dattes sur le cortège.
Le blocage de la mariée et sa famille devant la porte prend fin quand sa belle-mère et son fils « le mari » décident finalement d’ouvrir la porte pour l’accueillir avec du lait et du beurre rance. La jeune épouse boit trois gorgées de ce lait avant de mettre sa main dans le beurre et marque le haut de la porte d’entrée portant chance à son nouveau domicile. Une fois installée, la mariée se fait préparer par les femmes qui l’avaient escortée auparavant.
Après le déjeuner composé des tajines de viande, du pain de Tafarnut , et de Brkuks, la famille du mari se prépare pour accueillir la mère de la mariée qui sera accompagnée de ses amies et voisines. Ces dernières ramènent « Taglhit N Lbsis » s'agissant d'un grand récipient contenant Lbsis et emporté par une femme noire. Elles sont bien accueillies en leur préparant un bon repas de diner (le diner de la mariée). Après cela, tout le monde se prépare à la fête nocturne d’Ahwache.
Le deuxième repas de déjeuner est préparé à l’honneur de la famille de la mariée. Ce jour, les deux familles se connaissent et se partagent le repas pour sceller de nouveaux liens familiaux. Juste après, la famille de la mariée se prépare pour quitter les lieux et rentrer à sa demeure pour préparer le diner à la famille du mari. Une autre fête d’Ahwache se tient à l’honneur du gendre.
Toujours chez la famille de la mariée, les deux familles et tous les invités du village partagent le repas de déjeuner qui met fin à la cérémonie du mariage.
La mariée est bien installée et le mari est bien satisfait de sa jeune épouse, ce dernier part chez sa belle-mère accompagné de ses amis pour aller chercher « Tummit », c’est une préparation faite de la farine de blé et de beurre que la belle-mère prépare d’emblée pour cette occasion. Elle offre au mari Tummit mais aussi des dattes et des amendes qu’il partage avec ses amis accompagnateurs. C’est en fait un message implicite passé par le jeune mari à sa belle-mère stipulant qu’elle a bien éduqué sa fille et il est aussi un signe de gratitude.
Docteur en langues et communication et titulaire d'un master en tourisme et communication. J’ai eu l’occasion de développer l’expertise dans le domaine de la communication touristique. J’ai mené des recherches en ingénierie touristique et en développement du tourisme culturel.